Les photographies que l'on découvre dans le film et dans le livre CAMERA KIDS sont comme une salle de classe et ont beaucoup à nous apprendre. Elles sont prises par des enfants de prostituées ; des enfants qui ont grandi cernés par la violence et marqués par une stigmatisation sociale qui leur interdit l'accès à l'éducation.

Les appareils photo deviennent pour ces enfants des fenêtres sur de nouveaux mondes et, pour certains d'entre eux, une porte qui s'ouvre sur une nouvelle vie. Leurs photos nous racontent sans mots combien ils ont vu de choses et, pourtant, combien ils rêvent de rester innocents.

CAMERA KIDS est à la fois un livre, un film et une collection de photos qui nous permettent de percevoir le pouvoir de transformation exercé par un professeur de qualité et par l'étude de l'art. Zana Briski, une talentueuse photographe que son travail a entraîné en 1997 à Sonagachi, le plus grand quartier "chaud" de Calcutta, est ce professeur. Une fois arrivée là-bas elle a su qu'elle devait y rester.

C'est à travers les enfants que Zana est réellement parvenue à connaître Sonagachi. Ils l'ont doucement fait dévier de sa mission d'aide aux prostituées. Ils l'ont suivie, fascinés par son travail et par ses images. L'un de ses élèves, Gour, craignant que ses camarades filles ne soient les prochaines à entrer dans la prostitution, demanda à Zana de leur enseigner son métier. Il espérait que la photographie pourrait les aider à avoir une vie différente.

Zana a poursuivi son travail de photographe, fabriquant de belles et poignantes images de ses sujets, mais très vite son nouveau travail de professeur l'a complètement absorbée. La fascination des enfants pour l'appareil photo se nourrissait de la victoire de la découverte de soi et de l'existence d'un talent débordant, d'une immédiate évidence. Avec le temps, ils se sont appris mutuellement à voir. Là où elle voyait de l'obscurité et une beauté crue, eux voyaient des explosions de couleurs.

Munie d'un dossier, Zana est retournée à New York par intermittence avec comme nouvelle mission de trouver des appareils photo et de quoi financer le travail des enfants. Il a fallu six ans, quelques subventions et beaucoup de dettes pour réussir à ce que leur travail commun se poursuive. En chemin elle a obtenu le soutien de CONTACT PRESS IMAGES et de PIXEL PRESS et lui est alors venue la folle idée de faire un film de leurs histoires.

Elle a envoyé des cassettes de ce qu'elle tournait au cinéaste (et par la suite co-réalisateur) Ross Kauffman et très vite il se retrouva dans un avion, pour être saisi par les couleurs et le chaos à son arrivée à Sonagachi.

La FONDATION JEROME, l'OPEN SOCIETY INSTITUTE et les FONDATIONS SWARTS et FIREMAN les ont aidés à franchir les différentes étapes. Ils ont permis de réaliser des expositions à Calcutta, une vente aux enchères chez SOTHEBY'S et, grâce à AMNESTY INTERNATIONAL, un calendrier entièrement dédié au travail des enfants.

Une précieuse invitation du SUNDANCE DIRECTOR'S LAB et l'apport d'un financement à partir de leur fond pour le documentaire, a permis de faire de ces histoires un film. HBO a découvert ce travail alors qu'il était en cours au SUNDANCE LAB et a acheté les droits de diffusion du film aux Etats-Unis, une semaine avant que celui-ci ne soit accepté au FESTIVAL DE SUNDANCE. Au cours du Festival, le film a remporté le Prix du Public. Depuis il a gagné le coeur du public et des jurys de nombreux festivals à travers le monde et il a notamment remporté l'Oscar du Meilleur Documentaire en 2005. Chaque occasion de raconter leur histoire a encouragé un peu plus les enfants et les réalisateurs. Ils ont maintenant la possibilité de le faire auprès du public français.

Comme une sorte de legs vis-à-vis de l'ensemble des leçons apprises à Sonagachi, Zana a créé une Organisation Non Gouvernementale appelée KIDS WITH CAMERAS. C'est cette structure financière qui a permis au film, au livre et aux expositions photo d'exister et qui contribue à faire comprendre le pouvoir de l'appareil photo comme outil d'éducation et l'importance de l'enseignement visuel pour des communautés privées de droits civiques.

KIDS WITH CAMERAS mène désormais ce travail d'enseignement de l'art photographique auprès d'enfants défavorisés qui grandissent en souffrant de marginalisation. L'Organisation a jeté un pont entre ces enfants et le reste du monde, offrant à leurs visions des choses la possibilité d'être partagées et ressenties. Elle organise des rencontres pour permettre aux enfants d'exposer leur travail, de nous raconter leurs histoires et de se transformer.

Nous espérons que les spectateurs, les enseignants, les décideurs politiques, les philanthropes qui découvriront les enfants dans le film et dans le livre seront incités à soutenir leur travail, leur confiance et leur conviction. Espérons également que le film ou le livre soit utilisé comme outil pédagogique auprès des jeunes français.

Enfin, peut-être partagerez-vous ce conte de fées avec vos propres enfants en les encourageant à vous raconter leurs rêves au travers d'images et d'histoires.